Son joli manteau
Il faisait froid, cet après-midi-là. On était au début de novembre et dans une jolie petite ville de France sur les bords de la Loire. Rapide et légère, Odette descendait la Grand-Rue, ses cheveux blonds au vent et les joues toutes roses par le vent et la marche.
Pour la première fois aujourd'hui, sa maman lui avait permis de mettre son joli manteau neuf pour se rendre au cours de dessin. Il était si douillet, ce manteau, et d'un bleu si franc! On se sentait vraiment quelqu'un dedans. Il avait de magnifiques poches dans lesquelles les mains se perdaient. Et puis, il était long. Maman avait exigé cela et un grand ourlet. Puis, la couturière avait laissé à l'intérieur de larges coutures. Odette n'a que quinze ans, elle grandit tous les jours et maman n'est pas très riche.
Dans le soir qui tombe, les vitrines s'allument, et de temps en temps Odette s'arrête et contemple les jolis étalages. Elle cherche déjà des idées pour ses cadeaux de Noël. Munie de son petit carnet et de son crayon, vite elle dessine ses trouvailles, puis, consciente que le temps passe elle continue sa route.
La voici arrivée près de l'Église. Sous le porche, tous les jeudis se tient une mendiante à laquelle Odette ne manque jamais de porter quelque chose. Elle est là, transie, à peine couverte par un reste de robe d'été...
Odette pense au foyer qui l'attend, modeste certes, mais si accueillant, car maman veille à ce que l'on n'ait ni froid ni faim...
Si Odette s'écoutait, elle emmènerait la mendiante à la maison. Mais elle sait qu'on ne peut pas recueillir tous ceux qui sont sans foyer et que d'ailleurs ils ne se plairaient sans doute pas dans un milieu qui leur est étranger. Mais évidemment, se dit Odette, il faut faire quelque chose.
La femme raconte sa misère et Odette, dont le coeur est si compatissant, tortille depuis un moment le troisième bouton de son manteau. Tout à coup, sans qu'on sache comment, le manteau a passé des épaules d'Odette sur celles de la mendiante qui, interloquée, balbutie des remerciements tandis que la généreuse donatrice dit en s'enfuyant : « Ce n'est rien, Madame, ce n'est rien! J'ai encore un autre manteau à la maison. »
Sur le chemin du retour, Odette n'a pas un regret. Il n'y a pas très longtemps que Jésus est devenu son meilleur Ami. Autrefois, malgré son bon coeur, elle n'aurait jamais pu donner son plus joli manteau, mais maintenant elle sait que c'est Jésus qui lui a donné tout ce qu'elle possède et qu'il s'attend à ce qu'elle partage avec les gens qui sont moins heureux qu'elle. Elle a compris toute la joie qu'on éprouve à donner. Elle est si heureuse!
Maman le fut un peu moins quand elle vit sa grande fille arriver sans manteau.
- Ne pouvais-tu me consulter, Odette, avant de donner ton vêtement?
- Oh maman, elle avait si froid ! Il n'y avait pas moyen d'attendre et je suis sûre que si tu avais été à ma place tu n'aurais pas hésité. D'ailleurs, j'ai encore mon vieux manteau qui est seulement un peu usé et un peu court. Et puis, tu sais, maman, si Jésus le désire, il peut me donner un manteau neuf.
Madame Brunel n'insiste pas. Elle aussi est compatissante, elle aussi a donné son coeur au Sauveur et elle a expérimenté son amour. Elle sait que, du haut du ciel, un bon Père veille sur ses enfants.
Et voulez-vous savoir la fin de cette histoire? Quelques jours plus tard, une amie de Madame Brunel est venue lui rendre visite. Elle apportait un métrage de joli lainage bleu. « Ne croyez-vous pas, a-t-elle demandé, que cela ferait un joli manteau pour Odette? ... »
J'ai vu ce manteau: il était magnifique et il ne voulait pas s'user!